Initiation aux méthodes intégrées au jardin potager
Chapitre : Biocontrôles
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⇒ Autres méthodes limitant les risques de maladie
Sur la difficulté d’entretenir l'équilibre des écosystèmes dans un jardin microscopique.
Les potagers lilliputiens quelquefois délimités par quelques planches en bois sont à la mode. Les légumes faciles à cultiver comme les tomates sont le plus souvent prisés. Quelquefois de la cendre de bois, du compost « maison » ou d’origine douteuse est répandu sans discernement. La première année, des résultats acceptables sont souvent au rendez-vous puis, les déceptions s’accumulent les années suivantes. Le mildiou sur la tomate est de plus en plus fréquent. Les feuilles de courgettes sont plus facilement envahies d’une poudre blanche et meurent. Les radis sont creusés de galeries... Pour quelles raisons, année après année, ces déboires s'accumulent ?
Il est bien difficile d’engager une rotation des cultures dans un potager microscopique ce qui a pour conséquence d’accumuler dans le sol de spores d’agents pathogènes qui prospèrent tous les ans aux dépens des cultures légumières. En outre, l'apport d'engrais organique fabriqué à partir d'un compostage sans phase thermophile apporte facilement des maladies.
Alors que faut-il faire ?
Il faut agencer plusieurs parcelles à des endroits différents de la propriété ou agrandir la surface de culture de manière à ce qu’elle ait une forme rectangulaire divisée en planches afin de faciliter la mise en place de rotations. Sinon, il faut s’engager dans des monocultures alternées sur la parcelle unique. Par exemple, les tomates doivent être cultivées sur la même planche tous les 5 ans pour éviter qu'elles ne soient atteintes par l’alternariose ou le mildiou. Pour réduire l’émergence de maladies, le choix variétal privilégiant des plants résistants est indispensable, comme les hybrides F1.
Pourquoi il n’est pas conseillé de maintenir un jardin potager en dessous des arbres d’ornement.
Une autre erreur est souvent rencontrée chez des débutants jardiniers : la délimitation d’un jardin potager dans le périmètre du système racinaire des arbres fruitiers ou d’agrément. Ce dispositif est quelquefois choisi parce qu'il tiendrait compte des techniques de l'agroforesterie. Or, les arbres et arbustes doivent être disposés sur des espaces suffisants entre les parcelles cultivées afin d'éviter une compétition à l'encontre des cultures. Si les arbres et arbustes remontent l’eau et les sels minéraux des couches profondes, ils le font pour leur propre compte. La matière organique contenant ces sels minéraux est disponible lorsque les feuilles retombent sur le sol et après leur décomposition qui a lieu à la fin de l'automne et en hiver. Les racines des arbres, même si elles produisent de la litière souterraine qui sera transformée en biomasse, absorbent de grosses quantités de sels minéraux présents dans le sol.
Il ne faut jamais oublier que les arbres sont de redoutables concurrents vis-à-vis des petites plantes cultivées dans un potager. Dans les régions tempérées, d’une manière générale, le système racinaire d’un arbre s’étend au minimum sur une surface dont les limites sont celles des branches horizontales les plus longues, voire plus. La surface racinaire du chêne est capable de s’étaler sur 56,7 m² et plus de 60 m² pour l’érable rouge (3). Même si elle est régulièrement taillée, une haie située trop près d’un jardin potager produit les mêmes effets. Les associations entre les arbres et les cultures doivent être effectuées de manière à créer un environnement facilitant les services écosystémiques et non pas une zone aggravant la concurrence pour les nutriments du sol, la lumière solaire et l’eau.
Contrairement à ce qui est souvent prétendu dans des sites internet ou livres de jardinerie, l’irrigation par aspersion contrarie le développement de certains bioagresseurs (notamment acariens et oïdium), sous réserve qu’elle ne soit pas pratiquée le soir, voire très tôt le matin. Les thrips sont très courants en région PACA dont le développement est favorisé par le climat chaud et sec. Les thrips détestent l'humidité et des arrosages fréquents par aspersion réduisant la prolifération de ces insectes nuisibles. Bien entendu, l’irrigation par rigole ne produira pas cet effet protecteur. D’ailleurs, de nombreux vacanciers ont remarqué qu'en région PACA, les maraîchers et les arboriculteurs n’hésitent pas à irriguer par aspersion en été en pleine journée sans que cela affecte les récoltes.
C’est l’humidité persistante durant la nuit qui favorise l’implantation des bioagresseurs. L’irrigation par aspersion enlève les spores des bioagresseurs déposés par le vent et les insectes. Toutefois, un arrosage durant les périodes de canicule serait susceptible de brûler les feuilles des plantes les plus fragiles. L’idéal est d’arroser par aspersion en fin de matinée vers 10-11 heures juste avant la montée de la température, ou en fin d’après-midi s’il y a encore suffisamment de soleil pour assécher les tiges et les feuilles avant la nuit. En outre, il est certain qu’on gaspille plus d’eau par évaporation quand on arrose au milieu de la journée en période de canicule.
L’irrigation par le goutte-à-goutte est connue pour réduire la consommation d’eau. Elle a aussi l’avantage de réduire les infections cryptogamiques sur certaines plantations comme les salades qui sont très sensibles à l’excès d’humidité, surtout quand la pomme se forme (production de dépôts d’eau provenant de l’aspersion à l’intérieur de la pomme). Ce problème existe également dans les régions pluvieuses que l'on peut réduire par la pose de tunnel avec une couverture transparente et étanche pour protéger les salades. Cette couverture se replie sur le côté quand il ne pleut plus.
La mosaïque nécrotique de la tomate est causée par un virus polyphage sévissant sur le concombre ou d’autres virus de la pomme de terre transmis par des pucerons. Les jeunes plants sont plus fragiles que les plantes adultes. Il faut donc éviter de planter de jeunes plants de tomates sensibles à ces virus en plein air en juin et début juillet quand les pucerons sont à leur développement maximum. Ces plantations doivent être effectuées au printemps sous tennels plastifiés dès la fin des gelées.
Semi de graines de concombre en pleine terre protégé par un pot en terre cuite renversé.
L’usage des plantations en godet est devenu très courant. Ce système de plantation permet de gagner du temps et d’éviter l’usage de serre chauffée début printemps. Il existe de nos jours toute une industrie florissante des jeunes plantes potagères en godet pour les jardiniers amateurs et même pour les maraîchers. Les plantules sont livrées dans des godets remplis de terreau. Mais cette solution a des effets pervers. Pour certains végétaux, il existe un stress du repiquage plus ou moins agressif quand les racines de la plante sont mises en contact avec la terre de jardin. La plante en godet se trouve dans un milieu protégé et reçoit des traitements préventifs souvent à base de sulfate. Après le repiquage, elle se retrouve brutalement en contact avec un milieu plus agressif. Les plants de courgettes de concombre sont particulièrement sensibles au stress du repiquage. On peut tout aussi bien protéger la germination des graines semées en pleine terre à l’aide de petits pots en terre cuite renversés ; les graines étant placées dans un petit trou recouvert de terreau humide.
Prévoir 2 à 3 graines par pot pour remplacer les pertes éventuelles. On peut aussi tenter la germination des petites graines (salades, poireaux…) dans des châssis (encore dénommés couches) recouverts de cadres vitrés sur un support en pente orienté vers le sud. Un paillasson est placé sur les cadres vitrés en cas de gelée tardive. Ce procédé très ancien est très efficace pour obtenir des plants protégés du froid et déjà habitués à la terre de jardin avant le repiquage.