Initiation aux méthodes intégrées au jardin potager
Chapitre : Biocontrôles
Articles précédents ou suivants ; cliquez sur un titre pour accéder à la page
⇒ Protections biologiques intégrées ; première approche.
Première approche.
Depuis plus de 50 ans, le développement de l’industrie chimique a apporté une réponse efficace contre les bioagresseurs qui menacent les récoltes pour devenir un modèle essentiel et généralisé de protection des plantes. Les engrais et les pesticides ont permis d’obtenir des rendements élevés pour répondre à l’augmentation de la population mondiale (a). Mais les pesticides ont un effet négatif sur l’environnement et ils ont fini par sélectionner des bioagresseurs résistants aux molécules mises sur le marché. Ces résistances aux pesticides se sont également développées au jardin potager ; par exemple le puceron vert Myzus persicae dont certaines souches survivent aux néonicotinoïdes et aux pyréthrinoïdes (et aux molécules voisines ; les pyréthrines homologuées en agriculture biologique) (1). Ce puceron qui affectionne le pêcher, est très polyphage et se contente d’au moins 50 familles botaniques, dont les cucurbitacées (concombre, cornichons…), les solanées (pommes de terre…), les brassicacées (navets…). Les recherches se sont alors orientées vers des solutions alternatives moins agressives : sélection de variétés plus résistantes aux maladies, lutte biologique par l’épandage de prédateurs des bioagresseurs, utilisation de pièges contenant des hormones…
De nos jours, on ne traite plus les plantes cultivées à l’aveuglette avec des assemblages polyvalents contenant différents produits phytosanitaires dès que l’on découvre une tache sur un fruit ou une feuille. Un bioagresseur n’est pas forcément redoutable, une maladie peut être bénigne ne nécessitant aucun traitement, la taille d’un organe malade suffit quelquefois pour éradiquer une maladie naissante. Les produits phytosanitaires ont également été améliorés afin de réduire leurs doses et pour qu’ils soient plus ciblés sur les bioagresseurs se traduisant par un moindre impact sur l’environnement.
Pour réduire l’usage des pesticides, une stratégie d’ensemble a été définie dénommée Protection Biologique Intégrée (PBI) ou pour les fruits, Protection Fruitière Intégrée (PFI). Les PBI et les PFI incluent les techniques de biocontrôle qui consistent à optimiser les interactions entre les différents composants d'un écosystème afin de réduire la pression des bioagresseurs (corridors de biodiversité, importation d'auxiliaires utiles, protections physiques anti-insectes, technique de l'insecte stérile (TIS), produits phytosanitaires de biocontrôle....). Mais il faut aussi tenir compte de la formidable capacité d’adaptation à leur environnement des agents pathogènes et des ravageurs qui nécessite quelquefois d'utiliser les pesticides homologués en agriculture biologique, voire de revenir aux pesticides de synthèse.
Dans les protections biologiques intégrées, les pesticides sont utilisés quand toutes les autres méthodes ont échoué, mais pas dans n’importe quelle condition. Il faut que les populations d’organismes nuisibles dépassent un seuil au-delà duquel apparaissent des dommages irréversibles aux cultures se traduisant par des pertes économiques inacceptables. Les produits phytosanitaires de biocontrôles comprenant ceux homologués en agriculture biologique sont d'abord utilisés. En cas d'échec, les pesticides de synthèse sont alors utilisés.
Car les techniques de biocontrôle ne permettent pas de régler tous les problèmes rencontrés. En outre, l’agriculteur doit souvent faire face à des problèmes d’utilisation moins souples que les produits phytosanitaires tels que les contraintes de conservation du vivant (bactéries, insectes utiles...), les interférences négatives avec les autres phénomènes biologiques, la spécificité et la formulation des applications.
Comme pour les agriculteurs professionnels, le jardinier est confronté aux aléas de la lutte biologique. Il doit quelquefois faire face à des maladies très contagieuses causant des pertes considérables (rouille, mildiou …) nécessitant d’anticiper les attaques. Mais, avant de prendre leurs pulvérisateurs, bien des jardiniers devraient au préalable s’informer sur les caractéristiques des bioagresseurs qui menaceraient leur culture. Confusion avec des insectes utiles, traitement inutile d’infections accompagnant le vieillissement naturel, stress physique confondu avec une infection microbienne ou cryptogamique sont quelques exemples d’erreurs courantes commises au jardin potager.
La plupart des techniques de biocontrôles que l’on peut mettre en place dans un jardin potager sont décrites en cliquant sur l’une des lignes du menu situé en haut et à droite de cette page.
a) De 1960 à 2005, la population mondiale est passée de 3 milliards à 6,5 milliards d’habitants et la superficie agricole utilisée (SAU) par habitant est passée de 4300 m² à 2200 m² (source ONU-FAO).
Les jardiniers amateurs constatent qu’ils sont souvent confrontés tous les ans à des invasions de certains bioagresseurs (comme les pucerons, les larves qui creusent des galeries dans les carottes). D’autres bioagresseurs sont occasionnels et sont plus ou moins agressifs en fonction de facteurs changeants que le jardinier ne peut contrôler (comme le climat). Dans une même région, une parcelle cultivée peut être couramment envahie d’un ou plusieurs bioagresseurs dominants qui n’existent pas (ou sont moins nombreux) dans une autre parcelle située à quelques kilomètres.
L’existence de bioagresseurs dominants revenant fréquemment sur les cultures nécessite d’anticiper leurs attaques en commençant par modifier l’environnement (par exemple plantations favorisant la fixation des prédateurs de ravageurs…), d’installer des protections physiques (filets anti-insectes), de prévoir l’importation d’auxiliaires utiles. Les bioagresseurs occasionnels sont traités au cas par cas et notamment en fonction du degré de l’invasion et de leur agressivité, de la résistance des cultures qui varie d’une espèce à une autre et surtout du mode de culture (une culture mal nourrie et chétive résiste difficilement aux attaques des bioagresseurs).
•
Cette maladie se caractérise par des taches noires apparaissant sur le fruit, mais à l’opposé du pédoncule. Cette maladie bénigne est favorisée par des arrosages trop abondants, ou une carence en bore révélée par des analyses de laboratoire, ou le choix de certaines variétés très sensibles comme la « Roma ».
•
Elles sont causées par un excès d’eau.
•
Noircissement racinaire des carottes, endives, céleri, melon, laitue, tomate, haricot, concombre : il s’agit d’infections cryptogamiques consécutives à de mauvaises conditions de culture affaiblissant les plantes. Pour lutter contre ces infections opportunistes, il faut agir sur la cause et non sur la conséquence : humidité excessive, fumure déséquilibrée ou insuffisante…
•
Croute noire formée par plusieurs champignons accompagnant les piqûres d’insectes, surtout les pucerons, cicadelles et cochenilles. Les champignons se développent sur le miellat laissé par les insectes piqueurs sans entrer dans la plante. Il n’y a pas envahissement de la plante. Il suffit de couper les parties malades, d’isoler les plantes par des protections physiques et éventuellement de traiter les pucerons si leurs prédateurs ne sont pas encore présents, ou encore d’importer des prédateurs de pucerons.
•
Certaines maladies considérées comme problématiques avant récolte, apparaissent à la fin d’un cycle cultural telle la verticilliose et l’oïdium. Il est alors préférable d’arracher les plantes infestées après récolte et avant que ces maladies soient transmises à d’autres cultures plus récentes.
1) Résistance du puceron vert de pêcher (Myzus persicae) vis-à-vis des pyréthrinoïdes et des néonicotinoïdes -PLAN DE SURVEILLANCE 201 – ANSE – Ecophyto – août 2013